Bulletin 13

Bulletin 13

LES AMIS DE RAOUL SALAN LE BULLETIN

Disparition /

Alain de Lacoste-Laraymondie Jean-Marc Varaut

Nos adhérents ont publié

L’affaire du Bazooka – 2ème partie – le procès du Bazooka par Jean Paul Angelelli

Biographie / Alain de Lacoste-Laraymondie

ASSOCIATION «LES AMIS DE RAOUL SALAN»

24, rue alain Chartier – 75015 Paris – www.salan.asso.fr – info@salan.asso.fr

Manifestations

Messe à la mémoire du général Salan et de ses compagnons

Elle a été célébrée, le samedi 9 juin 2006, en l’église Saint Thomas d’Aquin par le père Decogné, prêtre de Saint François de Sales. Nous exprimons notre gratitude au père Decogné, au curé de Saint Thomas d’Aquin, et aussi, tout particulièrement, à Bernard Billaud grâce auquel cette cérémonie a lieu. Une soixantaine de personnes ont participé à cette messe dans un grand recueillement en présence des porte-drapeaux de plusieurs associations. Etaient représentées : l’A.N.A.I. par son président le général Simon, le Secours de France par le général Codet, le C.N.C. par le colonel Guignache, l’A.D.I.M.A.D., l’U.N.P (le général Piquemal, son président, retenu par une cérémonie en province avait témoigné par une lettre de sa « grande admiration au grand chef et au prestigieux soldat qu’était le général Salan »).

Le père Decogné a rappelé que Raoul Salan a servi en pleine lumière mais aussi en discrétion, l’essentiel étant pour lui la conscience de servir son pays. Il a également rappelé que les sacrifices consentis ne sont jamais inutiles : ils permettent à la Patrie de vivre.

Merci aux journaux amis pour l’annonce de cette cérémonie et aux associations qui l’ont diffusée à leurs adhérents 

Commémoration de la libération de Toulon

Comme chaque année, Serge Jourdes, président départemental du Var de l’A.C.U.F. et, également, notre délégué pour la région Provence Alpes Côte d’Azur organisera la cérémonie qui se tiendra le mardi 28 août 2006 à 11 heures au carrefour où est scellée la plaque rappelant le rôle du général Salan, alors colonel, dans la libération de Toulon dont ce sera le 63ème anniversaire. 

Que tous nos amis de la région se mobilisent pour que l’assistance soit nombreuse ; c’est un dû à ceux qui se sont battus et dont beaucoup sont morts pour la liberté. C’est également important pour montrer aux autorités locales et régionales notre idéal et notre poids en face des quelques officines toulonnaises à mentalité et à procédés de basse police qui, au lieu de défendre leurs idéaux honorables, oeuvrent dans l’insinuation, l’amalgame et la délation envers nos amis. 

Disparitions

Nous déplorons la disparition d’un défenseur de la grandeur de la France, en particulier au temps de l’Algérie française : Alain de Lacoste-Lareymondie, le 18 mai 2007.  Une biographie détaillée lui est consacrée en dernière partie de ce bulletin.

La parution posthume, en mars de cette année, des « Mémoires interrompus » de Jean-Marc Varaut (Flammarion, 459 pages), disparu il y a deux ans, remet en mémoire cet autre défenseur de l’Algérie française que fût ce grand avocat qui assura la défense de nombre de ses combattants poursuivis par la justice gaullienne.

Jean-Marc Varaut est né le 18 février 1933 ; fils d’avocat, il est lui-même avocat très jeune et devient l’un des collaborateurs de Maître Paul Arrighi qui sera bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris de 1959 à 1961. Il est élu premier secrétaire de la conférence du stage des avocats de Paris pour les années 1959 et 1960. C’est avec Paul Arrighi qu’il participe à la défense du général Challe lors de son procès, les 29, 30 et 31 mai 1961, devant le Haut Tribunal Militaire, jugeant sans appel, institué le 27 avril 1961 par Charles de Gaulle sous couvert de l’article 16 de la Constitution. 

Jean-Marc Varaut défend, devant les tribunaux spéciaux créés pour la circonstance par le pouvoir politique, de nombreux combattants de l’Algérie française, parmi lesquels :

  • Marcel Ronda, aux côtés du bâtonnier Charpentier, au procès des barricades à la fin de 1960 et au début de 1961, devant le tribunal permanent des forces armées de Paris,
  • le lieutenant Durand-Ruel du 1er R.E.P. et le lieutenant de vaisseau Pierre Guillaume (ce dernier, en tant qu’assistant du bâtonnier Charpentier), devant le Tribunal militaire spécial, 
  • le légionnaire Claude Tenne qui a exécuté le commissaire Gavoury (responsable de la lutte antiO.A.S. à Alger), le légionnaire Enea Cella, puis Pierre Magade, devant la Cour militaire de justice lors du procès du Petit-Clamart, 
  • le lieutenant Dupont, le lieutenant Delhomme, de nouveau le lieutenant de vaisseau Guillaume, le général Vanuxem, le capitaine Bigade et le capitaine Robert Poinard, devant la Cour de sûreté de l’Etat.

On sait la carrière que fit maître Varaut par la suite. On connaît moins son œuvre éclectique : une vingtaine d’ouvrages dont plusieurs à l’intersection de l’historique et du judiciaire :

  • l’abominable docteur Petiot (1974)
  • le procès de Nuremberg (1992)
  • le procès d’Oscar Wilde (1995)
  • le procès Pétain (1995) 
  • le procès de Jésus (1997)

En 1996, il est élu à l’Académie des Sciences Morales et Politiques dans la section de législation, droit public et jurisprudence.  

Jean-Marc Varaut est décédé d’un cancer le 26 mai 2005 à l’âge de 72 ans. Il était chevalier de la Légion d’honneur.  

Nos adhérents ont publié

Maître Olivier Sers, qui a fait à notre association le plus précieux des dons avec le manuscrit de la déclaration du général Salan à son procès, est aussi « l’émondeur, le présentateur et le traducteur » du texte des seize satires de Juvénal établi par Pierre de Labriolle et François Villeneuve.

Juvénal, Decimus Junius Juvenalis, (45-128 après Jésus-Christ) a connu onze empereurs, quatre guerres civiles et deux grandes terreurs déclenchées par des tyrans fous, ce qui fait de notre époque, par comparaison, un long fleuve tranquille. 

Toute la Rome flavienne (Vespasien, Titus et Domitien), avec ses vices, ses folies, ses violences portées à l’extrême, est passée au scalpel acéré de ce voyeur aigu, de ce styliste de haut vol, de ce caricaturiste hors pair, de cet antiféministe d’une mauvaise foi jubilatoire que fût Juvénal pour qui il faut rire de tout car le rire guérit de tout, mais en respectant l’homme et le serment juré.

Texte bilingue   341 p.  Les Belles Lettres   Classiques en poche 2002    9 €

Les années 1954 à 1962 n’ont pas été un long fleuve tranquille pour ceux qui, comme Alain-Michel Zeller, se sont trouvés dans un petit poste, puis à la tête d’un commando de harkis, sur la frontière tunisienne à aller traquer en zone interdite les unités F.L.N. qui tentaient de franchir le barrage.

Alain-Michel Zeller a écrit ce récit d’apparence simple et linéaire mais qui exprime toute l’ambigüité de la situation qu’ont vécue des dizaines de milliers de jeunes Français, décidés à se battre pour la France en Algérie, quitte à y risquer leur vie, tandis que les gouvernants négociaient avec l’ennemi l’abandon de cette terre et de ses habitants. Situation d’autant plus dramatique pour Alain-Michel Zeller que, tandis qu’il se battait, son père, le général André Zeller, avec les généraux Challe, Jouhaud et Salan, tentait en vain à Alger en avril 1961 un ultime sursaut pour sauver l’Algérie.

234 p.  Atelier Fol’fer  11 rue des Récollets, 75010 Paris, 23€ (port compris)

Bernard Billaud qui a écrit un livre remarquable de pénétration sur la personnalité de Jacques Chirac, « D’un Chirac, l’autre » (voir le n° 5 du 2ème trimestre 2005 du bulletin), est aussi le président des Amis de Georges Bidault et la cheville ouvrière d’une série de cinq bulletins d’une grande richesse publiés par cette association entre 1986 et 2004. Partant du constat que le rôle, dans l’histoire de la France des années 1940 à 1960, de Georges Bidault, successeur de Jean Moulin dès juin 1943 à la tête du Conseil National de la Résistance et par la suite président du gouvernement provisoire, est systématiquement occulté ou déformé, Bernard Billaud a entrepris de faire connaître la vraie personnalité du deuxième président du C.N.R.. Bernard Billaud se bat pour que l’histoire retienne la vérité sur Georges Bidault, y compris celle de l’homme qui sacrifia tout à son combat pour l’Algérie française. Il est le seul qui puisse écrire l’ouvrage définitif sur l’homme si attachant que fût Georges Bidault.  

Bulletin des amis de Georges Bidault, c/o Bernard Billaud, 12 rue des Jardins Saint-Paul, 75004 Paris

L’affaire du bazooka

2ème partie   Le procès du bazooka     par Jean-Paul Angelelli

Avant de tourner la page de 1957, il faut signaler qu’elle fut très importante pour la guerre d’Algérie. C’est l’année de la bataille d’Alger (gagnée), des débuts de l’installation sur l’initiative du général Salan des barrages électrifiés qui vont asphyxier l’A.L.N. intérieure, etc.

On a moins parlé de l’affaire du bazooka. Mais quelqu’un n’a pas cessé de s’y intéresser. C’est madame Rodier qui, sur les conseils du général Salan, s’est portée partie civile et tout au long de 1957 a harcelé les autorités pour avoir des informations sur le dossier. 

Finalement, fin janvier 1958, elle obtint, accompagné de son avocat, Maître Floriot, un rendez vous à Paris avec monsieur Guibert, directeur de la Justice militaire. Qui justifiera les nonlieux (de Griotteray, Knecht et Sauvage) par le fait que c’étaient des sous-ordres (sic).. « ne pouvant être incriminés  sans mettre en cause des personnalités plus en vue…cela pouvait déclencher des mouvements d’opinion qui pourraient menacer la stabilité gouvernementale, et être à la base d’un 6 février » (extraits d’une lettre de Mme Rodier au général Salan le 30 juillet 1957). L’allusion au 6 février concerne vraisemblablement le 6 février 1956 (quand Guy Mollet vint à Alger) plutôt que celui de 1934.

Monsieur Guibert, faisant appel aux sentiments patriotiques et à l’honneur de madame Rodier lui demande de renoncer « à ce que le côté politique du procès soit évoqué ».

Elle se laisse convaincre mais obtient la promesse, qui ne sera pas tenue, qu’elle pourra consulter le dossier après son retour de la Cour de Cassation. En vain. Elle sera désormais mise à l’écart. Guy Mollet, président du Conseil lui a adressé une lettre émouvante. Mais il est renversé en juin 1957 et remplacé par Bourgès-Maunoury. Et son Garde des Sceaux, François Mitterrand (qui a eu connaissance de tout le dossier), par Corniglion-Molinier.

Comme dit précédemment, les inculpés ont été transférés à Paris pour le procès prévu pendant l’été 1958. Leurs avocats font pression sur eux pour qu’ils reviennent sur leurs aveux à propos du complot et du comité des Six et les désavouent. Cet aspect du dossier est d’ailleurs écarté et des pièces essentielles auraient disparu lors de leur transfert entre Alger et Paris. A noter que l’avocat de Kovacs, Maître Tixier-Vignancour, a multiplié les interventions pour signaler l’aggravation de l’état de santé de Kovacs, son client.

Sur le plan gouvernemental, c’est la valse des présidents. Bourgès est renversé en novembre 1957 et remplacé par Félix Gaillard. Renversé le 14 mai 1958, il est remplacé par Pierre Pflimlin. La veille, c’est le 13 mai à Alger et la suite est connue. Le général de Gaulle arrive au pouvoir.

Il sera le dernier président du conseil de la Quatrième République. Son ministre de la justice est Michel Debré. 

Son Ministre des Armées est Pierre Guillaumat.

En Algérie où, au nom de l’armée (et de Pierre Pflimlin), le général Salan assume tous les pouvoirs, il s’est passé un événement relaté ici et inédit.

Maître Biaggi, avocat de Castille, et Alain Griotteray ont réussi à gagner l’Algérie en passant par l’Espagne. Mais, sur ordre du général Salan, ils sont arrêtés et envoyés en résidence surveillée à Adrar d’où ils s’échapperont grâce à des complicités locales. Biaggi a été très ulcéré et, le 5 juin 1958, il envoie une lettre au général Salan où, après avoir invoqué ses états de service, son

Maître J.B. Biaggi honneur,  son  patriotisme  blessé,  il Alain Griotteray défend Griotteray, et, semble-t-il, l’excuse : « Griotteray n’est pas Cinna mais refuserez-vous d’imiter la clémence d’Auguste ? ».

De même Knecht et Sauvage, en précisant que « tenu par le secret professionnel », il ne peut en dire plus, mais ajoute : « Je crois, en tout cas, détenir un certain nombre de possibilités et même de secrets d’Etat qui, de toute façon, doivent être portés à la connaissance du commandement ; malgré mais efforts, je n’ai pu y parvenir. Est-il trop tard ? Je ne le crois pas ». Et plus loin : « Il me serait facile, dans cette lettre, d’énoncer des vérités, des faits, des jugements, qui mettraient inutilement en cause, ou en suspicion, telle ou telle personnalité, civile ou militaire, actuellement en place. Qu’importe tout cela ?»

Le procès doit s’ouvrir le 24 juillet 1958, mais, début juillet, le colonel Alain de Boissieu

(gendre du général de Gaulle) rencontre le général Salan à Alger…Porte-parole de Michel Debré, il lui demande « de ne pas insister pour que le procès du bazooka vienne à l’audience ». Refus catégorique du général : « Les assassins doivent être jugés, quels qu’ils soient ». Le 9 juillet, le ministre des Armées Guillaumat donne des instructions « curieuses » (Salan). Il ne s’oppose pas au renvoi du procès en raison de l’état de santé de Kovacs et même à sa liberté provisoire ainsi qu’à celle des autres inculpés. Mais en cas de procès, refuse le huis clos.

Le procès est ouvert le 24 juillet devant le public et la presse. Kovacs est présent, transporté sur une civière. Tixier-Vignancour intervient. Il y a une bataille d’experts pour savoir s’il peut être jugé. C’est oui, mais dans l’après-midi, Tixier obtient le huis clos. Auparavant Biaggi a vitupéré la présence dans le public des représentants de « l’ennemi », c’est-à-dire la presse défaitiste (L’Express, Libération, etc.).

Que s’est-il dit lors de ce huis clos ? Dans ses Mémoires, le général Salan cite des extraits de la lettre  de protestation adressée au ministre des Armées par le colonel Cornu, commissaire du Gouvernement. 

Tixier fait état d’un accord..« établi entre les ministres des Armées et de la Justice »..pour ordonner la liberté provisoire : les accusés, dit-il, ne sont que les « artisans » d’un cerveau directeur dont les membres sont absents du procès et que lui et ses confrères ne manqueraient pas de citer pour la manifestation complète de la vérité sur l’affaire.

Finalement, la liberté provisoire est accordée aux inculpés (Castille, Fechoz, Gaffori, Della Monica). Mais Kovacs reste détenu car en principe il doit être jugé plus tard à Alger pour ses activités contre-terroristes. Il fait la grève de la faim, est transféré début août à l’infirmerie de Fresnes pour, à la mi-août, subir une intervention chirurgicale. C’est aussi le 7 août qu’à Alger se présente Christian de la Malène appartenant au cabinet de Michel Debré (officiellement, il ne l’était pas, mais disposait d’un bureau Place Vendôme au Ministère de la Justice). Qui ne rencontre pas le général Salan absent mais son adjoint, le général Dulac. Pour lui demander si le général tient toujours au procès et s’il s’opposerait à un huis clos..

         Philippe Castille                 Gabriel Della Monica                  Michel  Fechoz                        Christian Tronci

Le général Dulac, à l’issue de l’entrevue, dicte une fiche d’informations au général Gardon. Qui la transmettra au général Salan. Ecrite à la main, cette fiche est bien connue. Plusieurs fois reproduite.

 Elle sera citée en 1962 au procès du général Salan. Si le général Dulac, appelé à témoigner, est hésitant, le général Gardon confirme son authenticité.. A noter que, dans ses Mémoires, Alain Griotteray jette le doute sur « on ne sait quelle visite » de Christian de la Malène qu’il connaît pourtant bien. Sans commentaire..

Le procès se rouvre les 18 et 19 août 1958 mais en l’absence de Kovacs (hospitalisé dans une clinique privée) et de son avocat. Les inculpés sont toujours en liberté provisoire. Mais le général Salan interdit qu’ils retournent en Algérie. Nouveau renvoi.

Le procès se tiendra enfin du 6 au 15 octobre. Mais coup de théâtre. Kovacs prévient qu’il ne se présentera pas à l’audience. Dans des circonstances qui n’ont jamais été éclaircies, encourant la peine de mort, il ne fut pas, semble-t-il, très surveillé. Il a gagné l’Espagne et, plus tard, les Baléares, où il résidera jusqu’à la fin de ses jours.. Il sera condamné à mort par contumace mais  impossible à  extrader. A Palma  de  Majorque, il exercera  comme  médecin  réputé dans le domaine de l’acupuncture et plus particulièrement de l’auriculothérapie.

A l’occasion, il recevra ses anciens amis (comme Castille amnistié après 1968) mais n’a rien dit ou publié sur le bazooka. A moins qu’elle ne soit conservée dans certaines archives secrètes, la véritable personnalité de Kovacs n’a jamais été éclaircie. Ni les liens qu’il a pu avoir avec les services secrets français et étrangers. Kovacs absent devient un bouc émissaire commode. Les autres inculpés ont eu l’imprudence de revenir. Biaggi enguirlande Castille (il fallait te sauver..). Castille est condamné lourdement : 15 ans de réclusion criminelle. Les autres à des peines moindres mais élevées. Le procès s’est tenu en présence des généraux Salan et Cogny et de madame Rodier. Le dossier du complot n’a pas été. L’affaire est close.

Pour Christophe Nick « c’est le premier grand scandale judiciaire de la Cinquième République ». A noter que, d’après Alain Griotteray, le général Cogny, après mai 1958, connaît une certaine disgrâce. Le général de Gaulle a eu des preuves qu’il avait fait des offres de service à Pflimlin pour mater les insurgés d’Alger. Cogny est décédé le 11 septembre 1968 dans l’incendie de l’avion qui le transportait entre la Corse et la Côte d’Azur. Un incendie accidentel (un passager fumait dans les toilettes de l’avion) et non criminel comme le bruit en a couru à l’époque.. Parfois repris ici et là.. Il y a assez de mystères comme cela….

(A suivre)

  Lettre de Jean-Baptiste Biaggi au général Salan (extraits) Dans cette lettre écrite après que J.B. Biaggi et A. Griotteray se sont soustraits à la mesure d’éloignement à Adrar (à 1000 km au Sud/Sud-Est d’Alger) prise par le général Salan en accord avec le général Massu à leur arrivée à Alger le 16 mai 1958, Maître Biaggi affirme « sur son honneur d’homme, de soldat, de Français, de Corse et d’avocat » avoir tout ignoré, et jusqu’au nom de Kovacs, de l’affaire du bazooka. Il  affirme également qu’Alain Griotteray n’a pas trempé dans cette affaire.

Mon général, c’est avec une immense amertume que j’ai subi Adrar. Si je me suis soustrait à la bienveillante attention des autorités de cette localité, ce n’est point, je vous l’affirme, pour créer au commandement la moindre difficulté. Si l’on avait consenti à m’écouter, ou simplement à me mettre en contact avec les personnes dont j’avais demandé à les rencontrer, j’aurais sans doute convaincu mes interlocuteurs de ma volonté de servir, au besoin dans l’ombre, voire de m’effacer…

Gaulliste, patriote, désintéressé : tous ceux qui me connaissent savent que je le suis depuis trop longtemps pour changer aujourd’hui. Il me serait facile dans cette lettre d’avancer des vérités, des faits, des jugements qui mettraient inutilement en cause, ou en suspicion, telle ou telle personnalité, civile ou militaire, actuellement en place.

Qu’importe tout cela ! les événements, l’histoire, la victoire remettront les hommes et les choses à leur due place. Une seule chose importe aujourd’hui : sauver la Patrie, la servir. Et même s’il doit m’être interdit de la servir, à mon rang, avec mes actes et mes risques, je prie Dieu qu’il vous garde et qu’il sauve la France. Veuillez agréer, mon général, je vous prie, l’assurance de ma haute considération.      J.B. Biaggi

Alain de Lacoste-Lareymondie

Alain de Lacoste-Lareymondie est né le 7 janvier 1921 à Niort, dans les Deux-Sèvres, où sont père était Bâtonnier de l’Ordre des avocats. Après des études au collège Saint Hilaire de Niort, il obtient, à la faculté de droit de Poitiers, sa licence en droit, puis les diplômes d’études supérieures de droit privé, de droit public et d’économie politique. 

Dès 1946, année de son mariage avec Claude de PercinNorthumberland dont il aura quatre fils et deux filles, il est auditeur au Conseil d’Etat. En 1949, il est maître de conférences à L’Institut d’Etudes Politiques de Paris.  En 1951, sur les recommandations de  Roland Cadet[1], maître des requêtes au Conseil d’Etat, il est appelé par le général de Lattre de Tassigny, haut commissaire de France et commandant en chef en Indochine, pour être chef de son cabinet civil. 

Par la suite, Alain de Lacoste-Lareymondie est conseiller technique aux cabinets de Pierre Garet, ministre du Travail et de la Sécurité Sociale dans le cabinet Pinay (1952), de Pierre Courant, ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme dans le cabinet Mayer (1953), de Maurice Lemaire, ministre de la Reconstruction et du Logement dans le cabinet Laniel (19531954). En 1954, il est Maître des requêtes au Conseil d’Etat. De 1955 à 1956, il est conseiller technique au cabinet de Roger Duchet, ministre de la Reconstruction et du Logement dans le cabinet Edgar Faure. Durant ces années, il se rapproche du Centre National des Indépendants (C.N.I.).

En 1956-1957, Alain de Lacoste-Lareymondie est Commissaire du gouvernement à l’administration centrale du ministère de la Reconstruction et du Logement. En parallèle, il suit la session de l’Institut des Hautes Etudes de Défense Nationale (I.H.E.D.N.) dont le voyage de fin d’études le mène en Afrique Occidentale Française et en Afrique Equatoriale Française.

En 1957-1958, il est de nouveau conseiller technique de Pierre Garet, ministre de la Construction et du Logement dans le cabinet Félix Gaillard.

Au moment du 13 mai 1958, son ministre figure au cabinet de Pierre Pflimlin ; Alain de Lacoste-Lareymondie rencontre le colonel Juille de passage à Paris, Olivier Guichard, le général Corniglion-Molinier.

En juin 1958, par l’intermédiaire de Louis de Costier, il est pressenti pour être conseiller technique au cabinet du général Salan, Délégué général du gouvernement en Algérie. L’accord du cabinet du président du conseil est obtenu, en dépit de l’opposition de René Cassin, vice-président du Conseil d’Etat. Apprenant que son collègue au conseil d’Etat, Bernard Tricot, partisan reconnu de l’indépendance de l’Algérie est désigné comme conseiller aux Affaires algériennes du général de Gaulle, président du Conseil, il s’en étonne auprès de Georges Pompidou, directeur de cabinet de celui-ci, et ne comprend pas la logique qui veut qu’on l’envoie, lui, partisan de l’intégration, à Alger auprès du général Salan. Il  y est victime d’une méfiance croissante de la part des agents gaullistes qui se sont installés à Alger. De retour en métropole en octobre 1958, il est réintégré au Conseil d’Etat. Il se présente, sous l’étiquette « Indépendant », aux élections législatives de novembre 1958, dans la 1ère circons –

– cription de la Charente maritime (La Rochelle), dont le sortant est le communiste Georges Gosnat. Arrivé en tête au premier tour devant l’U.N.R. (gaulliste) Noël, il est élu au 2ème tour avec 16942, voix contre 15384 voix à l’U.N.R. Noël (qui s’est maintenu contre l’engagement de désistement pris précédemment) et 8470 voix au communiste

Gosnat. Son élection est annulée le 6 janvier 1959 par la commission constitutionnelle provisoire présidée par René Cassin sous des prétextes d’affichages en dehors des panneaux électoraux. Lors de l’élection partielle des 22 février et 1er mars 1959, provoquée par cette annulation, Alain de Lacoste-Lareymondie arrive de nouveau en tête au premier tour et bat le candidat communiste Georges Gosnat au deuxième tour par 21977 voix contre 14413. Il est membre de la commission de la Défense Nationale et s’inscrit au groupe des « Indépendants et Paysans d’Action Sociale ».

Jusqu’en juin 1962, il sera un défenseur intransigeant de l’Algérie Française. Dès le 19 septembre 1959, trois jours après le discours de De Gaulle proposant l’autodétermination avec ses trois possibilités (« Francisation », Association, Sécession), Alain de LacosteLareymondie est l’un des fondateurs du Rassemblement pour l’Algérie Française, avec Georges Bidault, Roger Duchet, René Caillemer, avec des députés du groupe « Unité de la République » et avec quatre députés U.N.R. : MM Arrighi, Biaggi, Battesti et Thomazo. Ces derniers sont convoqués par le bureau politique de l’U.N.R. le 21 septembre et sommés de ne pas adhérer à ce mouvement, en arguant de l’engagement de fidélité signé par tous les députés U.N.R. (fidélité aux objectifs de l’U.N.R., soutien de l’action du général de Gaulle, discipline de vote). Il est l’un des très rares députés (23 seulement) qui, le 15 octobre 1959, votent contre la politique (en particulier algérienne) du gouvernement défendue par le premier ministre Michel Debré. Le fossé se creuse entre les indépendants favorables à l’Algérie française et ceux qui suivent la politique de Charles de Gaulle. Ces derniers considèrent leurs collègues, MM Le Pen, de Lacoste-Lareymondie, Yrissou[2], comme des éléments « ultras » et prennent leurs distances.

Le 9 novembre 1961, lors de la discussion à la Chambre des crédits militaires de 1962, lors des explications de vote sur « l’amendement Salan », c’est Alain de Lacoste-Lareymondie qui, lorsque Pierre Messmer indique qu’il ne resterait pas un instant de plus ministre des Armées si l’amendement était voté, lance : « Tant mieux !», soulevant un tollé chez les députés U.N.R.

Avec 79 autres députés, il vote en faveur de cet amendement, qui n’est pas adopté.

Après l’allocution télévisée de fin d’année du général de Gaulle, le 29 décembre 1961, Alain de Lacoste-Lareymondie dénonce, à propos de l’Algérie, « la plus grande capitulation de l’histoire ». Il se dépense pour la cause de l’Algérie française, publie de nombreux articles dans « Combat » et dans « L’Esprit Public », donne des conférences dans toute la France. En février 1962, une mission en Allemagne d’Alain de Lacoste-Lareymondie et du colonel Thomazo, en tant que membres de la commission de la Défense, est interdite par Pierre Messmer, ministre des Armées. De même est interdite une mission du colonel Thomazo à Alger pour enquêter sur la fusillade du 26 mars 1962 (par une unité de l’armée française) qui a fait 80 morts dans la population européenne d’Alger. Ceci débouche, le 6 avril 1962, sur la démission collective du bureau de la Commission de la Défense Nationale, événement unique dans les annales de l’Assemblée Nationale. 

Le samedi 19 mai 1962, Alain de Lacoste-Lareymondie dépose en faveur du général Salan à son procès et fait une déclaration très nette sur la duplicité, dès juillet 1958, des gaullistes visà-vis de l’Algérie et vis-à-vis des hommes qui s’efforçaient d’y développer une paix française. Après l’indépendance de l’Algérie, lors des élections législatives des 18 et 25 novembre 1962, Alain de Lacoste-Lareymondie (6922 voix) est devancé largement au premier tour par le maire U.N.R. de La Rochelle, André Salardaine (18895 voix), et même par le communiste (8383 voix), payant ainsi sa fidélité à l’Algérie française ; il se retire pour le deuxième tour, emporté par le représentant de l’U.N.R.

Il retrouve le Conseil d’Etat non sans difficulté, Le président de la République, Charles de Gaulle, ayant tenté de s’opposer à sa réintégration de même qu’à celle de ses collègues, Patrice Brocas et Pascal Arrighi.

En 1963, il est l’un des possibles candidats pressentis de la droite pour l’élection présidentielle au suffrage universel de 1965. Finalement, c’est Jean-Louis Tixier-Vignancour qui le sera et Alain de Lacoste-Lareymondie intègre l’équipe Tixier. Après l’élection à laquelle Tixier n’obtient qu’un peu plus que 5% des suffrages, Alain de Lacoste-Lareymondie le suit à l’Alliance Républicaine pour les Libertés et le Progrès. Aux élections législatives de 1967, dans la 20ème circonscription de Paris (Auteuil, La Muette), il obtient 12660 voix au premier tour derrière Michel Habib-Deloncle (24463 voix) ; il est battu au deuxième tour par 26163 voix contre 14572.

Par la suite, Alain de Lacoste-Lareymondie est l’une des chevilles ouvrières de la création de la FACO (Faculté Autonome Cogérée) devenue depuis la Faculté libre de droit, d’économie et de gestion, faculté privée, non sectorisée, située au cœur de Paris.

En 1977, il soutient le mouvement de réappropriation de l’Eglise Saint Nicolas du Chardonnet destinée à la célébration de la messe selon le rite traditionnel.

Il s’engage également, et ce, jusqu’à la fin de sa vie, dans la défense de l’enfant à naître auprès de l’association « Laissez les vivre – SOS Futures mères » à laquelle il apporte toute sa compétence acquise au conseil d’Etat. Son intervention lors du 13ème congrès de cette association en mars 1991 est mémorable.

Son épouse décède le 16 mai 2007 ; il meurt deux jours plus tard, le 18 mai ; ses obsèques sont célébrées le 21 mai 2007 ; une messe de requiem est célébrée à Saint Nicolas du Chardonnet pour le repos de son âme et de celle de son épouse, le samedi 16 juin 2007. 


[1] Roland Cadet sera en mars 1961 membre de la délégation française lors des pourparlers d’Evian du 10 mai au 13 juin 1961. Il défendra la nécessité de garanties fortes pour les musulmans fidèles à la cause française. On sait ce qu’il adviendra de ces garanties : le massacre de dizaine de milliers d’entre eux, abandonnés par le gouvernement français au FLN dès mars 1962. 

[2] Inspecteur des Finances, ancien directeur de cabinet d’Antoine Pinay

Les commentaires sont clos.