BULLETIN 48 – ANNEE 2022
SOMMAIRE :
- Le mot du Président
- Jacques Saint-Pierre : « Chant funèbre pour Pnom Penh et Saïgon » : « une réaction intellectuelle de la Droite patriote en 1975 »
- Jacques Saint-Pierre : « Le Général Pierre de Bénouville face aux Généraux Raoul Salan et Edmond Jouhaud »
- Philippe David-Maufras : « Il y a 60 ans, Roger Degueldre »/ 1ère partie
- Nos adhérents publient: Gilles Hustaix, Jean-Maurice Garçeau et Pierre Pellissier
Le mot du Président
Chers Adhérents, chers Amis,
L’année du 60ème Anniversaire de l’abandon de l’Algérie va s’achever et un grand nombre de manifestations ont été organisées par des Associations Amies : Secours de France, Cercle Algérianiste, Cercle Bastien-Thiry, Véritas, ANFANOMA, Familles des Victimes du 26 mars 1962 de la rue d’Isly et le CDHA.
Qu’elles en soient toutes remerciées !
L’ARS y a pris sa juste part par sa présence effective, ses prises de parole, ses dépôts de gerbe ; y compris en signant le Livre d’Or à l’Arc de Triomphe où le nom du Général Salan… réapparaît plus de 60 ans après (Adieu aux Armes du 10 juin 1960).
Telle est bien la vocation de l’ARS : la défense de la mémoire de l’Épopée Coloniale de la France et de ses glorieux acteurs dont le Général Raoul Salan en est le parfait symbole.
Sa forte présence en Indochine (Laos et Viet Nam) avant et après la seconde guerre mondiale, son implication dans la libération de la France avec le commandement de Troupes Coloniales, son poste à haute responsabilité en Algérie nous incitent à persévérer dans notre action de mémoire.
Notre Association l’ARS fort de son nombre d’adhérents et de ses moyens y veillera ; cela est dans sa vocation, de sa responsabilité et de sa fierté.
Enfin, nous vous informons du lancement des opérations d’exhumation de la sépulture d’Hugues Salan, enterré à Alger et son transfert dans le cimetière de Vichy ; les modalités figurent sur un document joint au présent bulletin.
Merci pour votre fidélité et votre soutien à la mémoire du Général Raoul Salan.
Fidélité et Vérité
Hervé Pignel-Dupont
Nos actions en 2022
- Au Cimetière de Bourg La Reine, le 11 Mars 2022, dépôt d’une gerbe au nom de l’ARS sur la tombe du Colonel Jean Bastien-Thiry.
- Au cimetière de Vichy, le 12 Juin 2022, cérémonie et dépôt d’une gerbe sur la tombe du Général Raoul Salan et sur celle du Lieutenant Axel Gavaldon.
- Le 26 mars 2022, le Président de l’ARS était présent à la cérémonie du Quai Branly et à l’Arc de Triomphe : une gerbe sur la Tombe du Soldat Inconnu et le Livre d’Or a été signé.
- Les 24, 25 et 26 juin 2022, présence au Congrès national du Cercle Algérianiste avec remise du « Diplôme d’honneur de la Ville de Perpignan à titre posthume » au Général Raoul Salan, en présence du Président Hervé Pignel-Dupont et Raoul Canno, trésorier de l’ARS
- A l’Abbaye du Barroux, Messe célébrée le 6 Juillet 2022 pour le lieutenant Roger Degueldre.
- A Toulon, le 28 Août 2022, dépôt d’une gerbe au nom de l’ARS au Carrefour Salan.
« Chant funèbre pour Pnom Penh et Saïgon » : une réaction intellectuelle de la Droite patriote en 1975
En avril 1975, la chute du Viêtnam du Sud, du Cambodge et du Laos conquis par le Communisme ébranle le monde occidental.
En France, c’est la Droite patriote et nationale au sens très large du terme qui ressent ce désastre avec une particulière acuité. Cela s’explique par l’Anticommunisme virulent de ce courant politique mais aussi par le fait qu’elle voit cette grave défaite occidentale comme la conséquence de notre abandon de l’Indochine et de ses peuples en 1954. Elle considère avec justesse que les Etats-Unis, malgré leurs énormes moyens militaires et financiers, n’ont pas fait mieux que nous et ont même fait pire.
Cette nouvelle avancée du système communiste semble révéler un inexorable déclin de l’Occident. Les anciens partisans de l’Algérie française ont souvent aussi combattu et commandé en Indochine quand ils étaient des soldats en activité. Ceux qui étaient civils ont soutenu l’action de notre armée en Indochine face à l’action délétère du Parti Communiste. Puis ils ont soutenu le régime anticommuniste du Viêtnam du Sud. Roger Holeindre, ancien combattant d’Indochine et d’Algérie, ancien militant et détenu politique de l’Algérie française, est le symbole de cet engagement. Il crée, à la fin des années 1960, une association de soutien au Viêtnam du Sud qui obtient l’aide des principaux mouvements patriotiques et nationalistes français et s’oppose aux organisations gauchistes favorables au Viêtnam du Nord et aux Khmers rouges.
Durant tout le mois d’avril 1975, les militants du Parti des Forces Nouvelles (PFN) et du Front National multiplient les manifestations, réunions et actions spectaculaires destinées à sensibiliser les Français au drame vécu par l’ancienne Indochine française. La prise de Saïgon (30 avril) marque la triste fin du conflit. Une ultime action a lieu le 7 mai à Paris, une semaine après la chute de Saïgon. Ce jour-là, 1500 à 2000 militants (principalement issus du FN et du PFN) manifestent une dernière fois à l’appel de l’association de Roger Holeindre. Ces manifestations diverses furent malheureusement vite oubliées mais un témoignage exceptionnel subsiste sur ces évènements.
Il s’agit du livre édité et publié en juillet 1975 par le journaliste et écrivain Philippe Héduy, « Chant funèbre pour Pnom Penh et Saïgon ».
Philippe Héduy est un auteur de talent auquel on doit un brillant ouvrage sur la Guerre d’Algérie « Au lieutenant des Taglaïts ». Journaliste talentueux et apprécié dans la grande presse, il prend le risque d’animer la revue des partisans de l’Algérie française les plus déterminés : « L’Esprit public ». Il est très proche de l’OAS. En 1965, il rejoint « Minute » qui joue le rôle d’abri pour les journalistes que leur combat pour l’Algérie française a particulièrement compromis. Il a ensuite l’idée de créer le BPL (Bureau de Production Littéraire), bureau d’écriture de livres. C’est de là que naît l’idée, qu’il partage avec le journaliste de « Minute » et écrivain Jean Bourdier, de réaliser un ultime hommage à ce qui fut l’Indochine française ; une Indochine française qui vient de tomber dans les ténèbres du Communisme après près de trente ans d’une impitoyable guerre.
La méthode utilisée va être simple. Une lettre est envoyée début mai 1975 à 227 personnalités civiles et militaires, écrivains et journalistes. 112 n’envoyèrent pas de réponse. 17 s’excusèrent de ne pas y participer pour des raisons diverses. Une personnalité manifesta de l’hostilité. 5 acceptent mais ne peuvent finalement envoyer leur texte. 92 l’envoient dans les délais requis. Il en résulte un ouvrage composite mais brûlant de passion. Jean Bourdier écrira bien plus tard : « d’en relire maintenant certains passages me fait encore monter les larmes aux yeux ».
En fin de volume, le journaliste François Broche rédige une chronologie détaillée qui est un véritable récit historique en une cinquantaine de pages des évènements qui, de 1940 à 1975, ont marqué la descente aux enfers du Viêtnam.
La dernière page du livre établit une liste des capitales tombées entre les mains du Communisme de Saint-Pétersbourg en 1917 à Saïgon en 1975. Dans cette liste figure Lisbonne (1974). La Révolution des Œillets est donc vue comme une victoire du Communisme sur un régime pro-occidental. On y trouve aussi Djakarta avec l’inscription « 1965, puis libérée » et Santiago avec l’inscription « 1970, puis libérée ».
Les coups d’Etat militaires en Indonésie et au Chili sont donc analysés comme des libérations par les auteurs du livre. Cela révèle à la fois la dureté de leur Anticommunisme et leur vision internationale et même mondiale de la lutte contre le Marxisme. Cette idéologie, tout à fait compréhensible dans le contexte de Guerre Froide d’alors, n’a absolument pas dissuadé les 92 contributeurs de participer à cette entreprise. Aujourd’hui encore on est surpris par leur diversité et le prestige de beaucoup d’entre eux.
Ils sont divers par leur fonction sociale. Des militaires comme les généraux Salan, Jouhaud, Zeller, Navarre, Vanuxem et Bigeard, des colonels comme Trinquier, Charton ou même l’ancien héros de la Résistance, le Colonel Rémy côtoient des romanciers célèbres comme l’auteur de romans policiers ADG (Alain Camille), l’Académicien Jacques Chastenet, les écrivains Jean Raspail, Geneviève Dormann, Hubert Monteilhet, Michel de Saint-Pierre, Jean Cau, Pierre Gripari, Jean Mabire, le brillant auteur de romans d’espionnage et ancien officier Pierre Nord… On y trouve aussi des universitaires comme François Bluche, Pierre Chaunu, Jacques Soustelle. Les journalistes sont très nombreux comme Jean Bourdier, Pierre de Villemarest, Serge de Beketch, Pierre Charpy, Claude Joubert, Maurice Gaït, Dominique Jamet, Roland Gaucher, Marc Dem… Mais la diversité est aussi idéologique. Des Royalistes comme l’Historien Jean-François Chiappe et l’Universitaire Etienne Malnoux côtoient des Gaullistes et anciens Gaullistes comme Pierre Charpy, Raymond Dronne, Jacques Soustelle, le Colonel Rémy et des militants nationalistes mais républicains comme Jean-Marie Le Pen et Roger Holeindre. Des intellectuels appartenant au courant qui sera qualifié plus tard de « Nouvelle Droite » d’orientation païenne comme Alain de Benoist, Michel Marmin, Dominique Venner, Jean Mabire voisinent avec des Catholiques traditionalistes comme Marc Dem, Edith Delamare, Pierre de Villemarest, Roland Gaucher…
D’anciens résistants et Français libres comme le polémiste Algérie française André Figuéras, le colonel Rémy, le député de la Droite gaulliste Raymond Dronne, Jacques Soustelle signent leurs textes aux côtés d’anciens partisans de la Collaboration comme l’écrivain Saint-Paulien ou de Pétainistes convaincus comme l’idéologue nationaliste Jacques Ploncard d’Assac ou le directeur de « Rivarol » Maurice Gaït.
Mais nombreux sont ceux qui à l’origine sont issus d’autres courants, conservateurs ou libéraux, plus modérés et même de la Gauche modérée comme le général Salan lui-même ou qui n’ont pas d’engagement politique mais sont motivés par un profond amour du pays.
Cette diversité idéologique s’explique d’abord par le fait que le thème est rassembleur en unissant l’Anticommunisme et l’attachement à la grandeur de la France incarnée par un moment important de l’aventure française outre-mer : la présence française dans le Sud-Est asiatique. Cela rassemble largement et est nettement moins clivant que la question de l’Algérie française. Cependant, il est incontestable que la très grande majorité des contributeurs a été marquée par le combat pour l’Algérie française. La présence de ceux qui furent les principaux acteurs de cette lutte (Salan, Jouhaud, Zeller, Soustelle…) en est la preuve évidente.
Les divers courants patriotes et assimilés se rapprochent pour la première fois depuis la fin de l’Algérie française et certains Gaullistes d’accord sur l’essentiel se joignent à eux.
La forme des interventions est aussi marquée du sceau de la diversité. Pierre de Villemarest occupe près de 25 pages mais le général Salan (comme plusieurs autres) occupe moins d’une page. En moyenne les auteurs occupent 2 à 5 pages.
Le traitement du sujet est aussi très différent selon les auteurs. Certains font des textes très politiques et dénoncent notre déclin, d’autres ont une vision très géopolitique de la lutte contre le Communisme international, d’autres encore expriment leur passion pour l’Histoire, leur nostalgie d’une époque de grandeur révolue ou leur amour pour l’Indochine et ses peuples. Le texte de Jean-Marie Le Pen « Le message de Léonidas » est intéressant. Il faut aussi signaler la présence parmi les auteurs d’Yves Gignac, futur fondateur des Amis de Raoul Salan, un homme dont l’action et l’influence mériteraient aujourd’hui d’être étudiées de près car il fut un homme de l’ombre au dévouement sans limites pour la cause anticommuniste et patriotique. Les textes issus de la « Nouvelle Droite » sont très différents des autres, en particulier ceux d’Alain de Benoist et de Dominique Venner. Ils expriment un réel mépris pour la société occidentale des années soixante-dix. Ils rejettent les deux impérialismes des Etats-Unis et de l’URSS et aspirent au réveil d’une Europe qui aurait retrouvé son indépendance. La radicalité de leur pensée tranche sur l’état d’esprit des autres participants.
Le texte de Raoul Salan « Psaume pour une ville morte » mérite une certaine attention. Il traduit une forte nostalgie de l’époque qu’il a connue : « …le peuple de Saïgon a perdu sa gaieté ». Il exprime sa crainte pour l’avenir de cette population confrontée aux vainqueurs : « …pour ceux-là la pureté n’est que privation, l’intégrité que déportation, la fraternité qu’endoctrinement… ». Plus loin, il évoque « un premier adieu au monde libre, le nôtre… » et s’inquiète : « Une à une s’effondrent les barrières de la liberté ; celles que nous avions mises et dont nous étions si fiers. Quand il n’en restera aucune, nous aurons définitivement perdu le droit de vouloir et d’aimer. »
Le général Salan est bref (25 lignes) mais son texte est riche. Il se montre pessimiste, inquiet, désespéré. C’est la déclaration d’un homme qui a souffert et qui souffre encore, d’un homme qui craint l’avenir pour son pays et les siens. Mais c’est aussi une réelle déclaration d’amour à l’Indochine en général et au Viêtnam en particulier.
Ce livre demeure d’un immense intérêt pour l’étude de ce qui constitue l’origine d’un courant national moderne qui se développera dans notre pays à partir des années 1980. Il permet aussi de comprendre l’état d’esprit des hommes (il n’y a que 3 femmes sur 92 auteurs) qui ont participé aux luttes politiques et militaires pour le maintien de la puissance française en Afrique et en Asie. Mais par lui-même cet ouvrage a été fécond. Sa réussite amènera Philippe Héduy à développer une maison d’édition dont la production sera importante, la SPL (Société de Production Littéraire), ainsi que la revue « Item ». Plus tard, l’avocat et ancien député FN Maître Georges-Paul Wagner affirmera dans ses mémoires « D’un Palais l’autre », l’importance qu’auront trois structures de discussions, d’échanges et de réflexion pour l’avenir de la Droite patriote : la « Revue Universelle », le Cercle Jean de Brem et la revue « Item » justement issue de « Chant funèbre pour Pnom Penh et Saïgon ».
Jacques SAINT-PIERRE
Le général Pierre de Bénouville face aux généraux Raoul Salan et Edmond Jouhaud
Nombreux furent les Gaullistes déchirés par le choix de De Gaulle d’imposer aux départements algériens dans les pire conditions une indépendance qui fut une catastrophe pour l’Algérie et la France.
Certains rompirent avec le Gaullisme. Jacques Soustelle en fut l’exemple le plus célèbre. D’autres, plus nombreux qu’on croit, sans rompre avec le Gaullisme portèrent pour le restant de leur vie le deuil d’une cause qui leur avait été chère.
Pierre de Bénouville semble être un cas à part. Tout en restant gaulliste, il n’a jamais renié son amitié pour ceux qui avaient combattu pour l’Algérie française et n’a jamais renoncé à les aider en prenant des risques réels pour sa carrière politique. Dans un recueil d’entretiens avec la journaliste Laure Adler, celui qui avait été proche de De Gaulle mais avait aussi été un ami très proche de François
Mitterrand n’a pas hésité à rappeler son amitié pour les généraux Salan et Jouhaud ainsi que pour leurs camarades civils et militaires. Cela lui avait valu l’exclusion du parti gaulliste qu’il ne réintégrera qu’en 1970. Cette attitude étonne aujourd’hui où la diabolisation de certains par des historiens qui se font un devoir de ne pas chercher à comprendre leur sujet d’étude semble un fait acquis. C’est pourquoi il est nécessaire d’exhumer « Avant que la nuit ne vienne – Entretiens avec Laure Adler » de Pierre de Bénouville, ouvrage paru chez Grasset en 2002.
Les entretiens ont eu lieu entre septembre 1998 et juin 2000 mais à la demande de Bénouville, le livre n’a été publié qu’après sa mort survenue en décembre 2001. Ce dialogue entre un vieil homme qui a connu bien des évènements et des gens ainsi que leur complexité et une femme encore jeune qui n’a pas connu grand-chose est parfois horripilant mais malgré tout il s’agit d’un témoignage assez exceptionnel pour l’Histoire. A l’époque, il était passé assez inaperçu.
Ces entretiens passent en revue chronologiquement les grands moments qui ont marqué la vie de Bénouville ainsi que les principaux personnages qu’il a connus.
Royaliste et nationaliste maurrassien, il s’engage très jeune à l’Action Française. Il rappelle le poids intellectuel de l’AF durant les années vingt et trente qui l’a beaucoup marqué ainsi que l’importance des nombreux affrontements physiques avec les adversaires politiques et les forces de l’ordre, en particulier lors de la manifestation du 6 février 1934. Inquiet de la menace allemande et éprouvant un véritable dégoût envers la Troisième République, il rejoint ensuite l’organisation clandestine et activiste surnommée la « Cagoule ». Il avoue y avoir participé à des actions mais pas à des meurtres. Il soutient avec conviction l’insurrection nationaliste en Espagne à partir de juillet 1936.
Il participe avec un grand courage aux combats de 1940, puis il rejoint la Résistance où il jouera un rôle essentiel aux côtés d’Henri Frenay. Il fait alors preuve d’un Gaullisme exalté tout en ne reniant ni son Royalisme ni son Catholicisme fervent.
Après la guerre, proche de De Gaulle, il participe à la création du Rassemblement du Peuple Français (RPF). Il joue un petit rôle dans le retour au pouvoir de De Gaulle en 1958 puis, tout en restant gaulliste et assez proche de De Gaulle, il refuse de renier son attachement à l’Algérie française et à ceux qui la défendent. Jusqu’au bout, il maintient cette position, déclarant lors des entretiens : « Pour moi, on ne perd pas un tel gâteau du territoire. Historiquement, l’Algérie était française avant Nice ! ». Il ne retrouvera le parti gaulliste qu’en 1970.
Il connaît et apprécie de longue date les généraux Salan et Jouhaud. Désireux de rejoindre la France Libre, il rencontre le ministre des colonies de l’Etat, Français Lémery, qui le met en rapport avec son chef d’état-major. Ce dernier lui conseille, afin de quitter clandestinement Marseille, de s’adresser à Raoul Salan, un officier considéré comme très proche de la France Libre. La rencontre aura lieu et une amitié naîtra entre les deux hommes. Pour Bénouville, le rôle clandestin de Salan a alors été essentiel et c’est ce rôle ainsi que leur attachement commun à l’Algérie française qui l’amèneront à témoigner en sa faveur lors de son procès. Les juges considèreront même le témoignage de Bénouville comme un peu trop véhément comme on peut le constater en lisant les actes du procès. Il signale à Laure Adler l’existence d’une lettre envoyée à Salan commandant en chef en Algérie par De Gaulle et dans laquelle De Gaulle approuve les positions « Algérie française » de Salan qu’il fait siennes.
Il ne cache pas ses sympathies pour ceux qui ont rejoint l’OAS. Il assiste au procès du général Jouhaud aux côtés de Madame Jouhaud. Après l’annonce du verdict de condamnation à mort, il raconte qu’elle s’évanouit puis lui demande de la conduire auprès de son époux. Faisant jouer ses hautes relations au gouvernement, Bénouville la conduit à la Santé et parvient très vite à lui faire rencontrer le général Jouhaud puis il la ramène à son domicile. De retour chez lui, il rédige une lettre poignante à De Gaulle demandant la grâce du général. Puis il la porte à l’Elysée où le hasard lui fait rencontrer De Gaulle auquel il remet sa lettre accompagnée d’une demande orale. 36 ans plus tard, il pense que cette démarche a pu contribuer à convaincre De Gaulle d’accorder la grâce présidentielle. Il signale aussi que l’action de Pompidou en faveur de la grâce a sans doute été particulièrement importante. Il semble, à mots couverts, avoir eu bien d’autres activités en faveur des défenseurs de la province algérienne.
Ces entretiens Bénouville – Adler montrent la complexité d’une époque où les Français de bonne volonté ont tenté de défendre les intérêts de la patrie. Comme l’écrivit l’un d’eux, la difficulté n’était pas tant de faire son devoir mais de savoir exactement en quoi ce devoir consistait. Le destin du Résistant royaliste puis partisan de l’Algérie française mais aussi gaulliste fervent que fut Bénouville est là pour en témoigner. A la différence de beaucoup de ses contemporains, on ne peut lui reprocher d’avoir manqué d’honneur.
Jacques SAINT-PIERRE
« Roger Degueldre » : par Philippe DAVID-MAUFRAS (1ère partie)
NB : La fin de cet article sera publiée dans le Bulletin n°49.
- Le procès
- Article : « Ce que Degueldre n’a pas dit à ses juges »
- L’exécution
- Epilogue
« OFFICIERS PERDUS » de GILLES HUSTAIX Un nouvel adhérent, que nous avons accueilli avec joie, Gilles Hustaix, a publié un roman, « Officiers perdus ». « Revivez de l’intérieur les guerres d’Indochine et d’Algérie, assistez à la chute de Dien-Bien-Phu, retrouvez-vous en embuscade en plein djebel d’Algérie, savourez la victoire avant de découvrir la chute et finissez à la prison de Fresnes » ! Comment ces officiers pour la plupart gaullistes historiques (ils l’avaient rejoint en Angleterre) sont-ils venus à s’opposer à de Gaulle ? Était-ce eux, ou alors lui, de Gaulle, qui avait changé ? La Roche Tarpéienne est proche du Capitole. Comment après avoir connu tous les honneurs se sont-ils retrouvés dans la disgrâce totale ? Le martyre des officiers perdus de Dien Bien Phu à Fresnes. En 1982, peu de temps après son retour de l’armée, sort un film de Pierre Schoendoerffer : « L’honneur d’un Capitaine », où Nicole Garcia s’emploie à laver l’honneur de son mari injustement sali par les media même après sa mort. Ce jour-là, il s’est juré qu’un jour, il laverait l’honneur de son père incarcéré comme un criminel après le putsch d’Alger ! La Genèse du roman « Officiers Perdus » se trouve donc là en 1982, il y a 40 ans, suite au film « L’Honneur d’un Capitaine. » « Et il ne s’agit pas seulement de l’honneur de mon père ! L’honneur de tous ses Frères d’armes, l’honneur des Harkis, l’honneur des Pieds-Noirs ! » Ce roman, au travers de quelques personnages attachants, un général et son neveu d’une famille aristocrate, un Colonel basque truculent, accompagné d’un autre basque jeune officier, une eurasienne, belle à mourir, un curé qui deviendra évêque et même cardinal, vous fera découvrir cette histoire dramatique dans son exactitude, mais racontée avec humour et une certaine légèreté sans oublier l’amitié et l’amour qui y ont eu toute leur place ! Il est le fils d’un de ces officiers perdus. Né en 1956, il a baigné toute son enfance dans ces histoires héroïques. Il est également lui-même un ancien officier parachutiste des forces spéciales (Lieutenant au 13éme RDP), ce qui lui donne une parfaite connaissance de ce milieu. Il a cherché à rendre des faits graves, au moins agréables à lire, privilégiant l’émotion et l’humour. « Officiers Perdus » est un roman qui, comme tel, relevant de la fiction, de l’imaginaire, ne prétend pas à l’exactitude bien que le cadre historique soit exact. |
« LIVRE D’OR DES MILITAIRES FRANÇAIS PORTES DISPARUS EN ALGERIE »
« Le 30 août 2022, à l’occasion du 60e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie et dans le cadre de la Journée Internationale des personnes disparues, un monument à la mémoire des 652 militaires français portés disparus en Algérie a été inauguré à PORT-VENDRES à l’initiative de l’association SOLDIS ALGERIE qui a été créée en 2014.
Ce monument a pour but de rappeler à tous le drame de ces soldats français qui ne sont pas revenus, « ni morts, ni vivants » et de permettre à la France de leur exprimer de cette manière la reconnaissance qu’elle doit à ceux qu’elle a envoyés combattre en son nom. C’est aussi une réponse à l’attente des proches.
La sculpture est l’œuvre du sculpteur Virgil, peintre des Armées. D’une hauteur d’environ 4 m, elle domine un espace où sont alignées 12 plaques de marbre sur lesquelles sont gravés les 652 noms des militaires portés disparus.
Installée sur le flanc d’une vieille redoute défendant l’accès au port de Port-Vendres, la redoute Mailly, elle fait face au port et domine la mer.
Selon le général (2S) Henry-Jean Fournier, Président de SOLDIS ALGERIE, « ce monument est érigé, grâce à l’accueil de la ville de Port-Vendres et à la générosité de plus de 2500 donateurs individuels, de 200 associations (en particulier, l’ARS, Secours de France et le Souvenir Français) et au concours du ministère des armées. »
Par ailleurs, SOLDIS ALGERIE vient de publier un LIVRE D’OR sur le même sujet ; il rassemble les informations actuellement connues.
Pour tout renseignement s’adresser à :
– Association SOLDIS ALGERIE 15 rue Thiers 24 000 PERIGUEUX »