BULLETIN 36 – 1ER SEMESTRE 2013
SOMMAIRE :
- Recensions
Jean Deuve de Christophe Carichon : recension par Jean-Paul Angelelli
Discours et conférences de Charles Lacheroy présentés par Anne-Catherine Schmidt-Trimborn :
- Interview du Général Raoul Salan dans le mensuel «Lui» en 1972: « Tête en tête avec le Général Salan »
- Procès-verbaux d’interrogatoires du Général Raoul Salan (1ère partie)
Recensions
Jean Deuve, de Christophe Carichon.
Ce fut un personnage extraordinaire, à la Volkoff, tout au long d’une carrière dans les Services Secrets de 1944 à 1978. L’auteur en donne les grandes lignes. Il est né en Normandie en 1918 dans une famille de militaires. Très tôt engagé dans le scoutisme qui sera le fil conducteur de sa vie. Jeune aspirant en 1940, il est blessé dans les Ardennes. Après un séjour au Niger, il est envoyé à Calcutta dans une force spéciale anglaise (la 136 [1]) qui doit combattre les Japonais. Parachuté au Laos au début de 1945, il pratique contre eux la guérilla. Mais, une fois le Japon battu, séduit par le pays, il s’y intègre. Parlant la langue, connaissant bien sa culture et ses habitants, se mariant avec une laotienne convertie au catholicisme, utilisant ses scouts sur le terrain. Le Laos est un pays difficile, « un panier de crabes », indépendant en 1949 mais associé à France.. Menacé surtout par le Vietminh dans les années 50. Que Jean Deuve combat avec des moyens limités, mais en organisant la police et les renseignements. Il deviendra même le conseiller des plus hautes autorités. Au moment de la guerre américaine du Vietnam, il conseillera le »neutralisme » contre le communisme et les Américains….
Mais, en 1964, c’est le parti communiste laotien (le Pathet Lao) qui l’emporte et Jean Deuve et sa famille quittent définitivement le pays. Jean Deuve entre ensuite dans les Services Spéciaux (le S.D.E.C.E.) et devient un haut cadre du renseignement et de l’action sur le Sud-est Asiatique et au-delà.
Jean Deuve dans les années 80
Retraité à Granville, il écrira (sous pseudonyme) ses souvenirs, des récits historiques comme « Les services secrets normands : La guerre secrète au Moyen Age, 900-1135 » et même une étude sur les serpents du Laos dont il était expert. Sa mort à Paris en décembre 2008 a été discrète. Mais il est resté dans la mémoire de sa famille, de ses amis, de ses compagnons de combat et des scouts de Riaumont. Il méritait donc ce récit passionnant de Christophe Carichon, historien et chercheur.
Jean Paul Angelelli
Editions Artège, 2012, 295 pp., 18,90 €
Discours et conférences de Charles Lacheroy présentés par Anne Catherine SchmidtTrimborn.
Anne Catherine Schmidt-Trimborn, chercheur à l’Université de Metz, avait consacré au colonel Lacheroy une thèse soutenue devant la même université, « De l’officier colonial au soldat politique », qu’elle présente brièvement dans l’introduction de ce livre. Dont l’essentiel est la reproduction (intégrale) des différents écrits ou oraux du colonel, dispersés ou réservés aux archives.
Classés chronologiquement, on y trouve l’analyse que Lacheroy tira de son expérience sur le terrain à Bien Hoa en 1952-53, dans le Sud-Vietnam. C’est-à-dire l’utilisation par le Vietminh des « hiérarchies parallèles » encadrant la population et la mettant au service d’une guerre révolutionnaire difficile à combattre par des armes classiques.
Lacheroy revint plusieurs fois sur sa découverte, mal acceptée au début : une forme de guerre inspirée du communisme s’en prenant aux corps et aux âmes. D’où son efficacité. Mais, après la fin désastreuse du conflit indochinois, les analyses de Lacheroy furent mieux diffusées, jusqu’aux sommets de l’armée, d’où le succès de la conférence (reconstituée car sans texte) qu’il prononça devant 2000 officiers dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne le 2 juillet 1957. D’autant qu’en Algérie, la création des 5èmes Bureaux spécialisés dans « l’arme psychologique » contre le F.L.N. (même si celui-ci sur le terrain utilisait plus l’islam et la xénophobie que le marxisme) démontrait que Lacheroy avait raison.
Mais il ne fut pas compris ou mal compris après le retour du Général de Gaulle en 1958 (« Il avait dix ans de retard » a dit de lui Lacheroy) et, coupables d’ »activisme », les 5èmes Bureaux furent dissous après l’échec des barricades d’Alger en janvier 1960. Quant à Lacheroy, mis à l’écart, il continua son combat qui le mena au putsch d’Alger et à l’O.A.S. madrilène. Voir l’hommage que lui consacra notre bulletin dans son numéro 4 (du 1er trimestre 2005).
Préfaçant le livre, le professeur Olivier Dard souligne le « rôle essentiel » (et précurseur) du Colonel Lacheroy. La « guerre froide » qui fut son environnement est finie. Mais actuellement, certains experts américains remarquent que les guerres actuelles « asymétriques » (voir l’actualité) ont des rapports avec les ex-guerres qualifiées jadis de « subversives ».
Editions du Centre de Recherche Universitaire Lorrain d’Histoire, Ile du Saulcy, F-57006 Metz Cedex 1, 2012, 210 pp., 20€ port compris
Jean Paul Angelelli
Tête à tête avec le général Salan
Procès-verbaux d’interrogatoires du général Salan (1ère partie)
Maître Olivier Sers a fait don à l’association d’un ensemble de documents inestimables ; il s’agit du dossier de défense du général Salan de l’un de ses quatre avocats, Maître Tixier-Vignancour. Outre le manuscrit de la déclaration du général à son procès, y figurent les copies des procès-verbaux de ses interrogatoires par le juge Théret, celui-là même qui avait mené l’instruction relative au « putsch d’Alger » . Nous entamons la publication de ces procès-verbaux et renouvelons l’expression de notre gratitude à Me Olivier Sers.
Maison d’arrêt de la Santé
(A suivre)